En clôture d’un Congrès sur fond de tensions budgétaires, les Départements ont entendu le Premier ministre leur tendre la main sur les allocations individuelles de solidarité (AIS) et les mineurs non accompagnés (MNA). Les esquisses de solutions restent toutefois bien floues à ce stade.
« Monsieur le Premier ministre, vous êtes attendu ici comme le loup blanc », a lancé Dominique BUSSEREAU à Edouard PHILIPPE lors de la dernière séquence du Congrès.
A Marseille où ils ont été « merveilleusement reçus », les Départements ont vécu « un Congrès fort, avec beaucoup de débat », a déclaré le Président de l’Assemblée des Départements de France. Parmi 1.800 participants venus de métropole et d’outre-mer, 80 Présidents de Départements ont cette année fait le déplacement ; un « record » et une « fierté », s’était réjouie Martine VASSAL, Présidente des Bouches-du-Rhône, dès l’ouverture.
Si « ce Congrès n’a pas fait bouger les lignes », il aura toutefois été constructif, pour Dominique BUSSEREAU, grâce à des Départements capables, au-delà des sensibilités politiques, de faire cause commune. Adopté à l’unanimité par son Bureau, la motion de l’ADF met en avant la nécessité pour l’État d’apporter aux Départements des réponses sur trois sujets majeurs : les mineurs non-accompagnés, les allocations individuelles de solidarité (AIS) et la décentralisation et, en particulier, le respect de la libre administration des collectivités.
Après les déconvenues d’Orléans et le dialogue rompu avec les Régions, le chef du Gouvernement semble avoir eu à cœur à Marseille de ne pas froisser des Départements en attente de « mesures d’exception ». Dans une partition toute en demi-mesures, le Premier ministre a donc essentiellement invité les Départements au dialogue. « Je crois à notre capacité de discuter, nous ne dirons pas les choses lorsque nous ne pourrons pas les tenir », a-t-il insisté.
Et, en effet, les promesses sont à ce stade bien prudentes. Edouard PHILIPPE a d’abord appelé de ses vœux « une nouvelle étape de la décentralisation » d’ici à 2022, tout en confirmant qu’il n’y aurait « pas de nouvelle opération de mécano institutionnel ». A une exception notable près, celle de l’Ile-de-France où le Gouvernement et les collectivités seraient « obligés de bouger » (sur les questions institutionnelles, voir notre autre article).
Sur les AIS, si le principe d’un fonds de solidarité en loi de finances rectificatives pour 2017 a été annoncé, le Premier ministre ne s’est engagé sur aucun montant. « A moyen terme », le pilotage et le financement des AIS « doivent être revisités », ce qui implique « un regard d’ensemble sur la fiscalité locale », a-t-il ajouté. Dans la mission d’experts et d’élus qu’il avait mise en place une semaine auparavant, c’est Alain LAMBERT, Vice-Président de l’Orne, qui portera les enjeux des Départements. Le fruit de ces réflexions devrait se concrétiser dans le projet de loi de finances pour 2019.
Concernant plus spécifiquement le RSA, le dialogue s’inscrira dans la concertation relative à la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes. Autre piste évoquée : Edouard Philippe veut « donner » aux Départements « les moyens d’activer les dépenses sociales », éventuellement via « des expérimentations ».
Les Départements attendaient également des réponses sur le sujet des jeunes étrangers non accompagnés. « Nous sommes en difficulté financière, mais aussi en difficulté humaine », avait la veille déploré Dominique BUSSEREAU, rappelant que la charge pour les Départements est de 1 milliard d’euros cette année.
« L’État assumera l’évaluation et l’hébergement des mineurs entrants jusqu’à ce que la minorité soit confirmée », a annoncé le chef du Gouvernement. Une mission d’expertise « paritaire », composée de représentants des corps d’inspection de l’État et de l’ADF, devrait rendre ses conclusions d’ici la fin de l’année.
Enfin, sur les modalités de contractualisation autour des dépenses des collectivités, Edouard PHILIPPE s’est attaché à rassurer les Départements. Ces derniers présentent pour lui des « spécificités » du fait de la rigidité d’une partie des dépenses sociales. « Nous ne demanderons pas les mêmes efforts à des Départements en très forte croissance démographique et à des Départements en déclin », a-t-il ajouté.
« Nous avons des pistes de négociation, mais nous n’avons pas de solution », a estimé Dominique BUSSEREAU à l’issue du Congrès. « Maintenant on avance sur ces pistes, j’espère que ces pistes déboucheront sur des chemins mais on est encore loin de l’autoroute. »