Lutte contre la désertification médicale : les Départements engagés

Le constat est alarmant : les Départements sont de plus en plus confrontés au manque d’accès aux soins de proximité. En cause, les départs à la retraite massifs des médecins établis à la fin des années 1970 et le niveau insuffisant du numerus clausus, c’est-à-dire le nombre d’étudiants en médecine accédant à la 2ème année, pendant les années 1990.  Aujourd’hui, ce sont près de huit millions de Français qui vivent dans un désert médical et ne peuvent consulter plus de deux fois par an un praticien. Plusieurs Départements ont pris le problème à bras le corps pour trouver des solutions innovantes.

Opération séduction auprès des médecins

En donnant le ton, la Saône-et-Loire a innové dès l’automne 2017 par la mise en place du dispositif « installeunmedecin.com ». Son concept ? Encourager l’établissement des professionnels de la santé dans le Département, à l’aide de mesures financières. Aussi, le Président du Département, André Accary, a entrepris de recruter une trentaine de médecins généralistes avec un salaire fixe et équivalent temps plein (ETP), répartis dans les différentes antennes du Centre départemental de santé saône-et-loirien. Cette mesure se devait de « donner un certain confort à des candidats avec contrat de travail et unité centrale pour la gestion, afin que le médecin recruté fasse son métier, c’est-à-dire consulter et être décharger des tâches administratives ». Pari réussi : le modèle économique s’autofinance désormais (le fruit des consultations que le Département perçoit sert à rémunérer les médecins, le secrétariat et la logistique) et 20 000 patients ont ainsi retrouvé un médecin traitant. Un Atelier des Départements avait d’ailleurs été consacré à cette thématique en avril 2018 (cf. article dédié).

Dans la même veine, l’Orne a récemment lancé le projet « Startech Médecine », un espace de santé innovant, aménagé dans l’enceinte-même de l’hôtel du Département et intégralement financé par le Conseil départemental : avec trois médecins et trois internes en fin d’étude, accompagnés de deux secrétaires médicales, deux infirmiers et trois médecins retraités salariés à temps partiel, cette organisation promet à tous les Ornais un accès à des soins de qualité. L’Oise lancera également en septembre 2020 une bourse à destination des étudiants en médecine : une aide de 800 à 1 200€ par mois pendant les deux dernières années de leur cursus, contre la promesse de s’installer pendant cinq ans dans le Département.

Urgence dans l’urgence

Autre problématique et non des moindres, celle des urgences médicales : en Aveyron, un quart des interventions du SAMU demande des délais supérieurs à trente minutes pour rejoindre une unité hospitalière.  Aussi, afin d’apporter une réponse aux populations résidant dans les zones les plus éloignées, le Service départemental d’incendie et de secours (Sdis) local, l’Agence régionale de santé (ARS) et le Conseil départemental ont mis en place un module de formation à la fonction de médecin sapeur-pompier, destinée aux internes de médecine générale. En cas d’urgence, le régulateur du SAMU peut faire intervenir une équipe appuyée d’un médecin généraliste volontaire ainsi formé, pour faire une évaluation clinique puis décider si la personne doit être admise aux urgences ou si elle peut être prise en charge dans un cabinet médical. Les avantages de ce dispositif sont multiples : gain de temps pour les patients, économies financières pour la collectivité et désengorgement des services d’urgence. A noter que la Corrèze a prévu courant 2020 le recrutement de nouveaux médecins, en partenariat avec le centre hospitalier de Haute-Corrèze, dans le cadre du dispositif national de médecine partagée ville/hôpital. Le temps de travail de ces médecins sera organisé entre des fonctions d’urgentiste pour l’hôpital et de généraliste en ville, ceci dans les différents centres « Corrèze Santé » déjà opérationnels dans le Département, avec un financement pris en charge par l’ARS.

Les Départements dans leur ensemble sont force de proposition pour lutter contre la désertification médicale, qu’ils recrutent des médecins salariés, dotent les étudiants en médecine d’une bourse, mettent à disposition des locaux ou encore soutiennent le développement de la télémédecine. Gageons qu’il y ait à terme, un plus juste équilibre entre le nombre de patients et de praticiens…

 

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