Les Départements, naturellement

L’éclosion des bourgeons nous a inspiré pour la réalisation de ce dossier du mois consacré à la nature. Avec ses 4 zones biogéographiques (atlantique, continentale, méditerranéenne et montagnarde), la France compte en effet parmi l’un des patrimoines naturels les plus riches d’Europe. Faune, flore, le territoire regorge d’espaces de nature remarquables à protéger face aux risques d’artificialisation des sols et de perte de biodiversité menaçant les écosystèmes. Pour conserver cette richesse nationale, des politiques publiques de préservation de la nature ambitieuses sont nécessaires. En la matière les Départements sont en première ligne avec leur compétence Espaces Naturels Sensibles (ENS). Ils participent à la préservation de près de 200 000 hectares de nature, organisent des actions de sensibilisation et favorisent le tourisme respectueux de l’environnement. Les Départements mettent tout en œuvre afin que l’herbe soit plus verte ! On vous explique tout.

La biodiversité, un bien précieux

La biodiversité est le tissu vivant de notre planète. C’est l’ensemble de toutes les espèces animales et végétales, ainsi que tous les écosystèmes évoluant sur la Terre. La diversité biologique actuelle est le produit de la longue et lente évolution du monde vivant sur l’ensemble de la planète, les premiers organismes vivants connus datant de près de 3,5 milliards d’années.

Pour autant, cette biodiversité n’est pas immortelle et est menacée depuis plusieurs décennies. Si des accords internationaux concernant le climat et la biodiversité sont indispensables, les pouvoirs publics de chaque Etat doivent également en mesurer les enjeux. D’ores-et-déjà dotée d’une loi de 1976 sur la protection de la nature, d’une stratégie nationale pour la biodiversité (2011-2020), la France possède désormais une loi-cadre relative à la reconquête de la biodiversité promulguée l’été dernier. Elle répond à 5 grands objectifs :

  • éviter la disparition des espèces, valoriser le patrimoine naturel et les paysages ;
  • protéger la santé et stopper les pollutions ;
  • soutenir l’innovation et les emplois de la croissance verte et bleue ;
  • lutter contre le changement climatique ;
  • développer la croissance bleue.

Dans cette optique, une Agence française pour la Biodiversité (AFB) a été installée au 1er janvier 2017 et de nouveaux outils juridiques de protection ont notamment été créés. Le rôle des Départements acteurs de la protection et de la valorisation de la Nature y est d’ailleurs réaffirmé !

Les Départements, Gardiens de la Nature

Les Départements s’imposent en effet comme l’échelon pertinent pour mener des actions de protection de la biodiversité, et ce plus particulièrement depuis la loi du 18 juillet 1985 qui leur a conféré la compétence de mise en place d’une politique dite ENS.

Mais qu’est-ce qu’un Espace Naturel Sensible (ENS) ? C’est à chaque Département d’en fixer les limites, et ce en fonction des caractéristiques territoriales. Généralement, ce sont des espaces susceptibles :

  • de présenter un fort intérêt ou une fonction biologique et/ou paysagère ;
  • d’être fragiles et/ou menacés et devant de ce fait être préservés ;
  • de faire l’objet de mesures de protection et de gestion ;
  • d’être des lieux de découverte des richesses naturelles.

Les ENS sont donc des espaces diversifiés. On en dénombre plus de 4 000 sur la quasi-totalité du territoire français : sur le littoral, en montagne, en milieu rural ou périurbain. Ils comprennent aussi bien des espèces et milieux rares et/ou protégés que des espaces de « nature ordinaire ».

A ce jour, 99 Départements mettent en œuvre une politique ENS. Cette compétence départementale constitue tout à la fois un outil de préservation de la biodiversité des territoires, et un moyen de favoriser la réappropriation de ces espaces par les acteurs locaux et surtout les citoyens. La politique ENS a ainsi pour objectifs :

  • de préserver la qualité de sites, des paysages, des milieux naturels et des champs d’expansion des crues et d’assurer la sauvegarde des habitats naturels ;
  • d’être aménagés pour être ouverts au public, sauf exception justifiée par la fragilité du milieu naturel.

La boite à outils verte des Départements

Pour y parvenir, les Départements disposent d’une large palette d’outils qu’ils soient juridiques ou financiers, parmi lesquels le droit de préemption, les conventions de gestion, la part départementale de la Taxe d’aménagement ou la Charte des ENS.

  • Le droit de préemption : le Département peut déterminer sur son territoire des zones de préemption correspondant aux espaces susceptibles de devenir des ENS. Ce droit peut être exercé directement par le Département ou par substitution par les communes ou le Conservatoire du littoral ;
  • Les conventions de gestion : le Département peut conclure des conventions avec des propriétaires publics ou privés en vue de l’ouverture d’espaces naturels au public. En tant que propriétaire, il peut passer des conventions d’usage avec des acteurs du territoire en charge de la gestion des sites ;
  • La part départementale de la Taxe d’aménagement : une part de cette taxe permet aux Départements de financer les ENS à hauteur de 200 millions en moyenne par an. Elle leur offre la possibilité d’acquérir, d’entretenir, d’aménager les ENS, mais aussi de financer des études et verser des subventions aux communes ;
  • « La Charte des espaces naturels sensibles » de l’ADF : adoptée en 2006, elle vise à assurer une cohérence des politiques départementales et de favoriser la mise en place de schémas départementaux des ENS.

Les politiques des Départements en matière d’ENS s’inscrivent ainsi en complément des autres niveaux de protection de la nature (Parcs nationaux, Parcs naturels régionaux, Conservatoire du littoral…). Les partenariats techniques et financiers entre les Départements et les autres gestionnaires d’espaces naturels sont d’ailleurs nombreux.

Valoriser pour mieux protéger

La préservation de la biodiversité passe aussi par la sensibilisation de la population : éducation, accessibilité, insertion, les Départements se mobilisent auprès des habitants et des touristes.

De nombreux programmes pédagogiques sont ainsi conduits par les Départements afin de sensibiliser leurs jeunes collégiens à la connaissance et à la préservation des milieux naturels : visite d’ENS (Aveyron), nettoyage des plages (Charente-Maritime), initiation à la pêche (Val de Marne), ces mises en pratique sont essentielles pour former les jeunes générations au respect de l’environnement.

Le recensement et la qualification des espaces et des espèces est un autre moyen de préservation. Etablis sur la base d’outils et méthodes de cartographie, d’observation et d’évaluation, des Atlas  des paysages sont ainsi développés. C’est le cas notamment du Département d’Ille-et-Vilaine qui offre un portrait inédit de son territoire composé de 26 paysages à travers le site internet Atlas des paysages d’Ille-et-Vilaine, ou de l’Atlas du Finistère auquel nous avions accordé un article en décembre dernier.

Enfin, c’est aussi à travers une communication plus large et connectée que les Départements entendent sensibiliser les nouvelles générations ! Pionniers en la matière, les Pyrénées-Atlantiques ont créé l’application « Nature64 » pour faire découvrir les sites naturels du territoire sur mobile grâce à un service de géolocalisation et de réalité augmentée.

Les voyants au vert pour le tourisme vert !

Formidables sites de balades le week-end, les ENS peuvent également attirer à l’année de nouveaux randonneurs en recherche d’activités de plein air et d’espaces verts ! Car le « tourisme vert » a le vent en poupe :

  • Selon le Ministère de l’Economie, en 2015, 45% des touristes effectuent leur voyage dans un espace purement naturel (hors stations balnéaires et de ski) ;
  • Toujours en 2015, selon l’Organisation mondiale du Tourisme, les espaces naturels français représente 12 millions de séjours et 86 millions de nuitées.

Cette nouvelle façon de voyager est une aubaine pour des Départements comme la Lozère qui concentre sur leur territoire de nombreux grands sites naturels : Gorges du Tarn, Parc National des Cévennes, les Grands Causses, etc., ces sites mobilisent 4 100 emplois en pleine saison pour assurer quelques 6 millions de nuitées annuelles.

Parmi les activités proposées dans cette forme de tourisme à la campagne, l’ « Agritourisme » permet de partir à la découverte des savoir-faire agricoles des Départements en invitant les « agritouristes » à vivre le quotidien des exploitations agricoles ou des fermes.

Le sport est également une porte d’entrée active à la découverte de la nature, à pied ou à vélo. Depuis 1983, les Départements élaborent eux-mêmes le Plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée (PDIPR). Par exemple, les Alpes-Maritimes possèdent notamment dans leur réseau PDIPR de près de 6 500 km d’itinéraires, la plus grande tyrolienne de France (2 663 mètres) située à la station de La Colmiane.

Fêter la Nature

Depuis 2007, est organisée la Fête de la Nature, juste avant la journée de la Biodiversité. A l’initiative du Comité Français de l’Union Internationale de Conservation de la Nature et du magazine Terre Sauvage, les ENS s’animent pendant 5 jours pour accueillir les manifestations organisées par les  Départements à destination du public. Une super occasion de promouvoir des espaces parfois méconnu du grand public et de valoriser la grande variété d’activités proposées toute l’année… et les « Super-pouvoirs »  de la Nature, super thème 2017 !

 

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