Dominique Bussereau : le département intervient parfois en cas de « trous dans la raquette »

Dominique Bussereau, le président de l’Assemblée des départements de France, était auditionné le 9 juin par la mission sénatoriale d’information sur « le rôle, la place, les compétences des départements dans les régions fusionnées aujourd’hui et demain ». Cette mission mise en place par le Sénat en février dernier s’était donnée pour objectif de « faire le bilan des réformes récentes » (loi Notre, nouvelle carte régionale…) et d' »examiner le rôle que pourrait, à l’avenir, continuer à jouer la collectivité départementale, notamment dans les plus grandes régions, pour garantir l’équilibre social et territorial du pays ».

Lors de sa réunion constitutive, cette mission s’était également placée dans la perspective du futur projet de loi 3D. Mais sa première audition a évidemment surtout, été marquée par un autre contexte, celui d’une crise sanitaire ayant souvent mis les collectivités aux avant-postes. Y compris les départements, parfois au-delà de leurs actions habituelles. La crise a aussi plus que jamais donné une nouvelle acuité à une question récurrente depuis la loi Notre : le souhait des départements de pouvoir continuer à œuvrer en faveur du développement de leur territoire alors même que la loi les a écartés du champ de l’économie. Tandis que nombre de départements ont voulu aider le tissu économique local, que ce doit directement ou en abondant les fonds mis en place par les régions notamment, une instruction est venue leur rappeler le cadre en vigueur. Depuis cette audition du 9 juin d’ailleurs, une proposition de loi qui entendait permettre aux départements de soutenir les petites entreprises de leur territoire en cette période exceptionnelle a été examinée… et rejetée.

Le gouvernement confirmant entre autres à cette occasion, par la voix de Jacqueline Gourault, qu’on ne pouvait « imaginer que les départements puissent intervenir tous azimuts, alors qu’ils sont plus que jamais attendus par les Français en matière sociale ». La ministre les a en revanche invités à abonder le fonds de solidarité mis en place par l’Etat (voir ci-dessous notre article du 12 juin). Outre Dominique Bussereau, deux autres présidents de départements se sont exprimés lors de cette audition en visioconférence que Localtis a pu suivre : Philippe Pichery (Aube) et Laurent Somon (Somme). En réponse notamment aux questions des sénateurs Arnaud Bazin, le président de la mission, et Cécile Cukierman, sa rapporteure. Morceaux choisis, sous forme de verbatim.

Le département et l’ARS

Dominique Bussereau – « Nous pouvons tirer des conclusions de la crise sanitaire, en particulier pour les nouvelles attributions que les départements pourraient avoir en matière médicosociale et sanitaire. Nous voyons bien, par exemple, que la double gestion Ehpad-ARS a été mauvaise pendant cette période, comme d’ailleurs la double gestion ARS-préfet. Il faut revoir complètement le système de fonctionnement des ARS, aussi bien pour la place des autres services de l’État, que pour la place des collectivités. Nous travaillons donc, avec l’Association des maires de France et Régions de France, à la présentation, dans le cadre du « Ségur de la santé », d’un certain nombre de positions communes. Les propositions très fortes sur une nouvelle décentralisation, que nous ferons dans la première quinzaine de juillet, là encore avec l’AMF et Régions de France, tiendront compte également des inconvénients de l’organisation actuelle. Globalement, nous ne voulons pas d’uniformité, mais en même temps, nous comprenons le fait que nos concitoyens souhaitent des politiques départementales qui soient les plus harmonisées possibles. Dans le détail, nous demandons la conception et la définition des politiques sociales et médicosociales, ainsi qu’un « chef de filât » pour limiter l’influence des ARS, ou en tout cas participer mieux à la gouvernance des ARS. À ce sujet, j’ai une anecdote : la semaine dernière, j’ai appris par la presse qu’il y a eu seize morts dans un Ehpad de mon département, sans que le maire de la commune, le département, le préfet et l’ensemble des autorités en aient été informés. Cette situation est naturellement tout à fait inacceptable – je l’ai, d’ailleurs, dénoncée publiquement. »

« S’agissant des laboratoires départementaux, on s’est battu auprès d’Olivier Véran pour dire que nos laboratoires pouvaient être utiles aux campagnes de dépistage, il a fallu une longue bagarre pour qu’on les mette en service… et après, on a souvent vu les ARS faire en sorte de ne pas les utiliser ou pas assez. »

Renforcer les compétences sociales et médicosociales

« Dans le cadre de cette nouvelle décentralisation, nous souhaitons aussi la création d’agences départementales des solidarités, la gestion exclusive des maisons de l’autonomie, la mise en place d’une tarification unique sociale et médicosociale, la compétence pour recruter et nommer les directeurs des Ehpad départementaux, la gestion des bâtiments des établissements sociaux et médicosociaux, la généralisation du statut de la fonction publique territoriale pour les personnels de ces établissements, ainsi qu’un nouveau service départemental de la protection maternelle et infantile pour les enfants de trois à six ans. Ces propositions s’appuient sur un travail qu’a fait pour le compte de l’ADF, l’ancien sénateur Jean-Léonce Dupont – avec le président du Bas-Rhin, Frédéric Bierry. J’ajoute que nous voyons bien, dans cette période compliquée de rentrée scolaire – ou de rentrée dans les collèges et les lycées –, que la médecine scolaire est en grande déshérence. Nous pensons que les départements pourraient assurer cette compétence. »

« Sur le RSA, il y a des présidents qui sont favorables à la recentralisation de son versement, d’autres qui ne le sont pas. Ce n’est pas un débat droite-gauche. Nous avons de toute façon dit au gouvernement qu’il fallait ouvrir un débat sur le RSA. Sachant que nous avons une montée en puissance très forte des chiffres du RSA depuis le mois de mars, il faut remettre sur la table le problème du financement. »

Quid de la tentation métropolitaine ?

« Il y a eu en effet à un moment une tentation des métropoles d’absorber nos compétences. Ce qui posait problème, c’est qu’on est allés trop loin à mes yeux dans la définition des métropoles (…). Les métropoles ont toute leur utilité sur le plan économique, l’organisation actuelle des pouvoirs est correcte. On peut bien-sûr améliorer les liens entre la métropole et le département. Pour l’instant, les seuls problèmes qui ont existé ont eu lieu à Dijon. Le débat sur les métropoles n’a pas été rouvert par le gouvernement. Lorsqu’il l’avait ouvert, tout le monde s’était retiré. Je pense que le problème ne se pose plus. En tout cas, personne n’a eu envie de prendre la compétence sociale (…). Quant aux solidarités territoriales, on voit bien que s’il n’y a pas le département pour les assurer, cela peut être mortifère pour les plus petites communes. Donc ce débat a eu lieu, il a été tranché par le chef de l’État et par le gouvernement, pour l’instant il n’est pas rouvert. Mais puisque de nouvelles autorités métropolitaines vont être élues, peut-être que certains nouveaux patrons de métropoles, ou leurs exécutifs, auront envie de le rouvrir, et nous serons très attentifs au maintien de la situation actuelle – non pas par conservatisme mais parce que nous pensons qu’il y a une différenciation des rôles qui nous paraît plutôt saine. »

Le département dans la grande région…

« Régions et départements… Pendant cette période de crise, il y a eu beaucoup de choses de faites ensemble, en particulier s’agissant des commandes de masques, de blouses, de surblouses, de matériel divers, qui ont fait l’objet de commandes communes. Il y eu également un travail commun sur la relance économique. En Nouvelle Aquitaine par exemple, nous étions deux fois par semaine en audio ou visioconférence, les douze départements et le président de région. C’est certainement plus facile lorsque le périmètre historique est respecté, lorsque la région est de taille convenable, que dans les très grandes régions. Les couleurs politiques jouent peu (…). Certes il y a pu y avoir des présidents de région ayant de grandes ambitions nationales. On a ainsi pu voir certaines régions vouloir s’occuper des Sdis, des collèges… On a parfois assisté à des choses assez amusantes, des guerres d’egos – c’était à qui mettrait un masque devant les caméras… Tout cela est sans gravité à partir du moment où cela n’entraîne pas de dysfonctionnements. »

… et sa compétence économique

« Sur les transferts de compétences, il y a deux domaines ou les choses posent encore des difficultés. Il y a le transport scolaire : je pense que donner l’entièreté de la compétence aux régions n’a pas toujours donné de bons résultats (…). D’autre part, l’économie. On voit bien que dans les dispositifs de l’État, dans les dispositifs des régions, il y a des trous dans la raquette. Ce qui a amené un certain nombre de départements à contourner la loi Notre, malgré une circulaire que nous avons jugée assez déplacée. La crise a amené un certain nombre de départements à prendre des initiatives en matière économique. Quelques exemples : le département de l’Orne qui ajoute 500 euros aux 1.500 euros de l’État, d’autres qui rajoutent au dispositif de la région, ou qui font des avances économiques, ou des avances aux intercos pour leurs politiques économiques… Jusqu’à présent, à part Marseille qui est toujours un cas un peu particulier sur le plan politique, les préfets ont laissé faire. A partir du moment où ces dispositifs n’étaient pas erronés ou pas de nature à remettre complètement en cause l’esprit de la loi Notre… Donc pour l’instant ces dispositifs se déploient, avec discrétion mais efficacité. Cela montre bien que la loi Notre est allée trop loin en enlevant toute compétence économique au département. Certains de mes collègues en profitent d’ailleurs pour demander le retour de la clause de compétence générale. »

« Nous nous sentons bien dans notre job de solidarité. La solidarité sociale – et là-dessus, après cette crise, nous pouvons aller plus loin dans le développement de notre rôle – et les solidarités territoriales – on voit bien que durant cette période, les petites communes avaient besoin de nous. C’est nous qui les avons approvisionnées en masques, qui les avons aidées à rouvrir leurs écoles, qui leur avons apporté beaucoup de prestations… Donc je pense que les régions ont toute leur légitimité pour avoir encore plus de compétences en matière d’économie et d’emploi, dans la mise au point avec nous des contrats de plan État-région en associant les autres niveaux de collectivités. Que les départements peuvent renforcer leur rôle social et territorial. »

« Le problème en matière d’action économique, parfois les EPCI n’ont pas les équipes. C’est d’ailleurs la même chose avec la loi de Mme Borne sur les mobilités, on dit aux EPCI faites du transport local, s’ils n’ont pas les équipes, est-ce qu’on va aller demander à la région Nouvelle Aquitaine de s’occuper d’un petit système de transport à Felletin dans la Creuse pour une communauté de communes ? »

Finances

« Nous attendons une baisse de nos recettes, vraisemblablement au minimum 4 milliards d’euros pour les DMTO. Nous attendons une hausse de nos dépenses, en particulier le RSA, mais aussi naturellement toutes les dépenses liées à la crise Covid. Face à cela, l’État met en place un système d’avances, mais nous souhaiterions qu’il aille encore plus loin que les avances et qu’il y ait des compensations. Je viens décrire au Premier ministre en ce sens. Pour que l’État, aussi, nous aide à maintenir la péréquation horizontale, à laquelle nous sommes très attachés (…). On voit bien que les départements qui donnent beaucoup dans le cadre de cette péréquation vont avoir des difficultés cette année sur les DMTO donc nous sommes en train de voir dans le cadre de notre commission des finances comment on peut maintenir ce système tout en l’adaptant à ces baisses de recettes de DMTO sur l’exercice 2020. »

« Concernant le remplacement du foncier bâti par une part de TVA, nous continuons de penser que même si l’année prochaine, le système voté permettra une compensation par la TVA, si la TVA baissait parce que la situation économique ne s’améliore pas, nous aurons de grosses difficultés.

« Les contrats de Cahors ont vécu, il ne faut pas qu’ils reviennent. On a bien vu le caractère contraignant et peu décentralisateur de la méthode. »

« Le manque d’autonomie fiscale peut nous gêner à terme. Il faut donc un grand texte de décentralisation, mais aussi un grand texte fiscal. Il n’est pas sain, y compris pour les régions et les communes, qu’une grande partie de nos recettes soient des dotations de l’État. »

Décentralisation et déconcentration

« Je partage le souhait qu’il y ait un grand texte de décentralisation. Ce serait une folie, après cette période de crise où l’on a bien vu l’importance du niveau local, qu’il y ait simplement des mesurettes, qu’il n’y ait pas un grand effort girondin. J’y ajoute aussi une déconcentration. On voit bien que le niveau des préfets de département est le niveau qui doit être fortifié dans ses équipes, dans ses moyens. On a bien vu pendant la crise que c’était le bon échelon pour gérer et que certains préfets sont aujourd’hui dépourvus de moyens d’action, d’équipes, de cadres supérieurs en nombre suffisant… Tout a été mis au niveau des régions, tant mieux, les préfets de région ont leur rôle, mais nous pensons que cette décentralisation doit s’accompagner d’une réorganisation de l’État sur le terrain. Ce qui inclura les ARS. Je ne mets pas en cause les dirigeants, les hommes… mais on voit bien que les ARS n’ont pas donné satisfaction et que la dichotomie entre ministère de l’Intérieur et ministère de la Santé durant une crise sanitaire n’est pas bonne pour la gestion de cette crise.

Les CPER

« Le souci des départements, c’est d’être autour de la table. Dans ma région, lors des précédents contrats, les départements et les agglos étaient autour de la table, ce qui a permis d’avoir des financements très élaborés. C’est mieux que de se tourner dans un deuxième temps vers les départements une fois que les décisions ont été prises au niveau régional. »

Les Sdraddet

« Je suis assez peu optimiste sur les Sdraddet, qui sont de grands machins. Je ne suis pas sûr de leur efficacité réelle sur le terrain. »

Territoires unis

Nous avons choisi, AMF, Régions de France et ADF, de travailler ensemble au sein de Territoires unis. C’est toujours plus pratique pour un gouvernement. Cela va par exemple nous amener à avoir des propositions et une position commune sur le futur texte de décentralisation. J’espère que nous serons très proches des propositions du Sénat.

Philippe Pichery, Président de l’Aube (Grand Est)

La grande région, c’est loin

« Ces grandes régions ont induit une telle distance que j’ai un peu le sentiment qu’on vit chacun de son côté. Il y a bien des sujets sur lesquels on aurait matière à avancer ensemble mais la distance fait que ce lien de collaboration… aujourd’hui s’il faut aller de Troyes à Strasbourg, c’est 4h30 de route… Cet éloignement est pour moi préjudiciable à l’action collective. »

« Les régions ont été face à un challenge considérable. Il a d’abord fallu harmoniser les anciennes politiques. Et ça, ça a été très long. Et cela ne permet pas de prendre en compte les spécificités, les atouts, les handicaps qu’il peut y avoir sur certains territoires à l’intérieur de la région. Et donc pendant très longtemps, la région a dû définir ses nouvelles politiques. Jean Rottner m’a dit récemment, maintenant on va travailler au plus près des territoires, plus avec une politique uniforme, mais avec des contrats de territoire. J’espère que cette phase va renforcer nos liens. »

« Les transports scolaires, c’est vraiment une aberration, de les avoir retirés au département, alors que c’est étroitement lié à la gestion de nos routes, de nos établissements… et puis on a gardé le transport des handicapés, et aujourd’hui il y a des surcoûts, parce que chacun organise de son côté, il faut qu’on essaie de se concerter… »

Le département et le développement économique local

« L’économie : Philippe Adnot, mon prédécesseur, avait fait de l’économie et de l’enseignement supérieur le fer de lance du développement du département. La loi Notre a donc été pour la collectivité un vrai traumatisme. Nous avons pu nous organiser pour transférer les moyens conséquents dont nous disposions vers les EPCI, mais souvent avec beaucoup de difficultés. Aujourd’hui il y a en effet des trous importants dans la raquette. Je citerai deux exemples. L’Aube a créé une université, une technopole, un hôtel d’entreprises, tout un cluster qui a profondément modifié l’économie du département. Aujourd’hui, cette superbe machine tourne au ralenti. Parce que le relai n’a pas pu être pris, ni par l’EPCI local, ni par la région (…). Le département voudrait construire de nouveaux bâtiments pour accueillir des start-ups qui frappent à notre porte, or la loi ne le permet pas. On a bien passé des conventions avec l’EPCI pour apporter des aides à l’immobilier d’entreprises, mais la loi ne nous permet pas de confier à un autre acteur la construction immobilière, donc on est bloqués. Ce sont des centaines d’emplois qui devaient être créés.

Autre exemple, celui d’un EPCI de petite taille, qui a peu de moyens. Avec des entreprises qui ont besoin de garanties que l’EPCI ne peut pas apporter. Le département en aurait les moyens mais là encore, la loi ne le permet pas. Il nous faut retrouver des souplesses. Il ne s’agit pas du grand soir du retour de la clause de compétence générale : même si ça aurait du sens, c’est devenu un sujet tabou. Il faut simplement trouver le chemin pour qu’en matière d’intervention économique de proximité, un département comme le nôtre, qui a les moyens, qui a les compétences, puisse avancer. Notre département reste de fait un acteur majeur du développement économique local, pour une raison très simple : il est propriétaire de tous les terrains des zones industrielles sur lesquelles les entreprises nouvelles se créent, il est toujours propriétaire d’un patrimoine immobilier très conséquent qu’il met à disposition de ces entreprises (…). »

Conventionnement avec les EPCI et la région

« Pour ma part, j’ai conventionné à la fois avec les EPCI pour continuer à apporter des aides à l’immobilier d’entreprises, des bonifications de loyers sur les entreprises accueillies sur la technopole… et j’ai conventionné avec la région sur le fonds de résistance, fonds complémentaire à celui de l’Etat, dans le cadre de la situation covid. Le conventionnement, en fait, est dicté par le cadre de la loi. En matière économique, les EPCI ont la compétence de l’immobilier d’entreprises et les régions ont la compétence des aides aux entreprises. Ils sont donc sur deux segments différents et selon l’objectif que l’on a, on conventionne avec l’un ou avec l’autre. Le vrai problème c’est que dans ce dispositif de conventionnement, il y a des manques. »

Délégations

« J’ai souvent eu des discussions avec Jean Rottner ou avec François Baroin pour la métropole de Troyes, sur des choses qui pourraient être déléguées au département. Des contrats de coopération, cela me semble vraiment être la bonne idée pour tenir compte des spécificités de chaque territoire, mais encore faut-il que la loi le permette. On a bien senti que durant la crise, l’autorité de l’Etat fait preuve d’une grande clémence par rapport à un certain nombre de décisions et ne poursuit pas sur le fondement de la seule légalité, parce que c’est l’intérêt de tous… mais c’est quand même une situation qui n’est pas satisfaisante, nos collectivités courent un risque juridique (…). »

Le social, c’est aussi de la prévention

« Il y a aujourd’hui une idée, qui est je crois une mauvaise idée. C’est celle de dire que les départements vont devoir faire face à des dépenses d’allocations sociales conséquentes, et qu’ils doivent par conséquent conserver leurs moyens financiers. Or le principe de base de l’action sociale, c’est la prévention. Avant de payer des allocations, qu’est-ce qu’on peut faire pour que les citoyens ne se retrouvent pas dans ces situations ? Nos départements préféreraient avoir les souplesses leur permettant d’agir en amont, et notamment dans l’économie de proximité, pour offrir aux gens des possibilités de se solvabiliser, plutôt que de leur verser des allocations. »

Laboratoires

« Le laboratoire départemental de l’Aube, lui, a fait un travail très intéressant avec l’ARS, qui l’a équipé d’installations complémentaires et aujourd’hui, notre laboratoire est un pilier dans la réalisation des analyses. »

Laurent Somon, président de la Somme (Hauts-de-France)

Quel chef-de-filât ?

« Il y a sans doute eu dans un premier temps la volonté des régions d’être… disons hégémoniques, lors de la mise en place de ces nouvelles régions. Puis les choses se sont stabilisées. Elles ont vu que la proximité était compliquée du fait de leur géographie, et ce sont donc ensuite davantage appuyées sur les départements. »

« En matière de chef-de-filât, encore faudrait-il qu’on l’applique dans tous les domaines. Ainsi, si le département est chef de file en matière de solidarités sociales, il doit pouvoir, dans le respect des lois, être le maître du jeu sur son territoire, ce qui n’est pas toujours le cas. Il peut y avoir des velléités, de la part de certaines métropoles ou agglomérations, via leurs CIAS, de vouloir reprendre la main sur un certain nombre de politiques sociales. Le chef-de-filât en matière économique est bien reconnu à la région. Mais on voit bien que celle-ci peut être amenée à solliciter les départements et que l’Etat ne revient pas dessus. On le voit dans les Hauts-de-France avec la réalisation du canal Seine-Nord-Europe, qui pourrait enfin trouver un aboutissement sous réserve que les départements, qui n’ont pourtant pas la compétence transports, mettent la main à la poche. Je pense ainsi que sans revenir totalement sur la loi Notre, il y a une nécessité que cette loi s’adapte aux territoires. On ne demande pas à rebattre toutes les cartes. »

Les CTAP

« En matière d’économie, les Hauts-de-France ont décidé de prendre une délibération générale destinée à permettre à toute collectivité, sans aucune restriction, d’abonder le fonds de soutien aux entreprises en difficulté. Là où le bât blesse, ce sont les CTAP. En tout cas chez nous, les compétences partagées ne sont pas définies. Alors quand on nous dit – alors même que le tourisme, l’agriculture ou le sport sont censées être des compétences partagées –, qu’on ne peut pas intervenir notamment pour aider l’hôtellerie-restauration parce qu’on n’a pas la compétence économique, cela me paraît un peu désuet. »

CPER

« Les deux anciennes régions, Nord-Pas-de-Calais et Picardie, avaient deux politiques différentes en matière de contractualisation dans le cadre des CPER. Dans le Nord-Pas-de-Calais, les départements y étaient associés tandis qu’en Picardie, il y avait un contrat entre chaque département et la région, ce qui permettait de se fixer des objectifs en matière d’investissement. De ce fait, il y a une incertitude aujourd’hui dans les Hauts-de-France quant à savoir comment le futur CPER sera fixé. »

 

Partager l'article