Loi Notre : Le débat sur la clarification des compétences est lancé

Mardi 16 décembre, en présence des ministres Marylise Lebranchu et André Vallini, le Sénat a commencé l’examen du texte sur la clarification des compétences qui mobilise les sénateurs et de nombreux Présidents de Conseils généraux. La discussion générale qui a duré huit heures trente a été ponctuée par deux décisions du Gouvernement : engager la procédure d’urgence et le dépôt de 35 amendements revenant sur les travaux de la commission des lois. « Ce texte est pour l’instant vôtre. On verra s’il devient nôtre », a lancé, comme en défi, Bruno Retailleau.

Si le gouvernement veut renforcer les régions sur le plan économique, les sénateurs ont décidé d’infléchir le texte afin de reconnaître les politiques de proximité des départements, qui désormais vont s’inscrire dans le contexte des 13 régions stratèges aux délimitations considérablement élargies. Au nom de cette proximité, la commission des Lois aidée par les commissions saisies pour avis, se sont opposées aux transferts à la région des collèges, des routes, des ports et des transports scolaires gérés par les départements. Il convient de rappeler que ces transferts figuraient dans le texte initial demeuré inchangé malgré l’évolution du discours du Premier ministre et de son Gouvernement à l’égard des conseils généraux et des futurs conseils départementaux.

Plus de clarté

Les sénateurs, désormais majoritairement à droite, n’ont pas manqué en préambule de rappeler l’évolution de la position du Premier ministre. Nombreux à gauche comme à droite ont d’ailleurs demandé au Gouvernement de clarifier sa ligne soulignant que « ce va-et-vient est peu propice à l’exercice de la démocratie locale » comme l’a précisé Bruno SIDO, Président du Conseil général de la Haute- Marne).

A gauche, cette interrogation a été partagée, ainsi Christian FAVIER, Président du Conseil général du Val de Marne a insisté sur  » la confusion  » induite par ces évolutions.

Défendre les compétences du département

Sur tous les bancs politiques, les Présidents de Conseils généraux ont pris la parole pour rappeler l’utilité et la modernité du département. René Paul SAVARY, Président du Conseil général de la Marne, rapporteur de la commission des Affaires sociales a réaffirmé les deux piliers que sont la solidarité entre les hommes et entre les territoires, rappelant au passage que la commission s’est aussi penchée sur la question de l’accueil des mineurs étrangers isolés. Pour sa part, Claude HAUT, Président du Conseil général de Vaucluse a clairement identifié le département comme chef de file des proximités et a posé la question de savoir qui peut nier « l’importance de la solidarité en période de crise ? Elle représente 38 milliards sur 71 milliards de dépenses départementales » a t-il rappelé. A ses côtés Marie Françoise PEROL DUMONT, Présidente du Conseil général de la Haute-Vienne s’est aussi interrogée sur l’intérêt de transférer les compétences du département à l’échelon régional. « En quoi la gestion des routes départementales profiterait-elle à la nouvelle grande région Limousin-Poitou-Charente-Aquitaine, dont je salue la création ? Le déneigement des routes du Limousin se fera-t-il mieux depuis Bordeaux que depuis Limoges ? Pourquoi ne pas avoir transféré la gestion de la DETR aux départements ? L’État se désengageant, les départements se sont dotés de services d’ingénierie, au profit des communes« . a-t-elle lancé. Selon Jean Jacques LOZACH, Président du Conseil général de la Creuse « la vraie simplification doit s’effectuer entre les régions et les services de l’État car il y là un gisement d’économies. La Cour régionale des comptes de Rouen a recensé 19 organismes chargés du développement économique !« . Pour Philippe ADNOT, Président du conseil général de l’Aube, « ce texte est liberticide pour les départements. Ils ont évolué depuis les premières lois de décentralisation. Ce sont plus que jamais des collectivités de proximité modernes, sans parler de leur scrutin intégralement paritaire. Nous voulons qu’ils puissent prendre des initiatives économiques. Dans le mien, c’est le conseil général qui est intervenu pour soutenir trois entreprises en difficulté ».

Mme Lebranchu se dit prête à trouver un maximum d’accords

La ministre de la Décentralisation, Marylise Lebranchu, a défendu tant bien que mal son texte. « Il est temps d’en finir avec les rivalités inutiles entre territoires, parfois entre élus, qui fait perdre de l’énergie et du temps« , a-t-elle lancé en ouverture de la discussion générale. Après avoir rappelé que le président de la République et le Premier ministre ont demandé de « trouver un maximum d’accords avec le Sénat, tout en respectant le travail de l’Assemblée nationale« , elle a déclaré ne pas être « la ministre des éditorialistes et des think tank libéraux qui veulent déchirer le département et balayer la commune« .

1100 amendements déposés

C’est donc une longue discussion qui se prépare à partir du 13 janvier pour examiner les 1100 amendements déposés. Pour sa part, l’ADF a acté les acquis de la commission des lois confirmant le rôle des départements dans la décentralisation et a déposé une série de propositions afin de doter les Conseils généraux des moyens nécessaires pour la conduite des politiques de demain : l’élaboration des schémas de l’accessibilité des services publics, la non suppression au niveau départemental des commissions de modernisation des services publics, la consolidation de l’ingénierie territoriale, l’intégration des SDIS dans les services départementaux, la liberté pour le Président de conseil général de nommer les directeurs de foyers de l’enfance, la liberté tarifaire qui doit leur être accordée afin de maitriser les dépenses dans le secteur social et médico-social. Cette discussion verra la confrontation des 35 amendements du Gouvernement destinés à revenir sur la suppression des nouveaux transferts de compétences à la région. Après le Sénat début janvier, l’Assemblée nationale discutera à son tour le texte avant les élections départementales de mars prochain.

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